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Considérations stériles sur l'impudeur d'écrire...

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Considérations stériles sur l'impudeur d'écrire... Empty Considérations stériles sur l'impudeur d'écrire...

Message par ibere64 Sam 21 Jan - 15:03

La pudeur, je l’éventre peu à peu au fil de mes écrits. Me livrer ne me délivre pas de moi-même. C’est que je ne sais pas écrire sans puiser dans mon vécu. Je peux habiller la vérité avec les  oripeaux d’un romanesque approximatif, je peux aussi lui tordre le cou pour tenter de l’empêcher de surgir au détour d’un poème ou même d’une simple  phrase, mais c’est peine perdue : Elle finit toujours par me trahir en éclaboussant la page blanche de ses évidences parfois crues et brutales. Je me fais toujours avoir. Je me dis que cela peut être mal perçu par ceux qui me font l’honneur de me lire, qu’ils doivent penser que je suis un monstre d’égotisme et d’égocentrisme. Je ne suis pas cela. Mais le fait est là : Une fois achevés, la plupart du temps, mes textes me sautent à la gorge et j’ai l’impression de les découvrir avec toujours ce sentiment  étrange qu’ils m’ont été dictés par mon inconscient. Je veux dire que je ne pense pas ce que j’écris. Ça sort de moi à gros bouillons, comme  un courant dans lequel je me laisse emporter. Quand j’en ai terminé d’écrire, je regagne péniblement le rivage de la lucidité, comme un naufragé qui s’échoue sur une plage, un peu groggy, pas vraiment sain et sauf, mais vivant, vivant de tout le poids de ses douleurs et de ses peurs. De ses folies aussi…

Alors voilà, je me dis qu’il  me faudrait apprendre à imaginer, à construire des histoires. A me dissocier de moi-même et des mots que j’écris. D’autres le font très bien. Je les envie. Mais à chaque fois que je m’y essaie, c’est un échec. Les mots ne me viennent pas, j’écrivaillonne péniblement en langue tirant comme un élève planchant sur sa dissertation  en pensant à autre chose. Et ça ne manque pas : Très vite, je prends la tangente sans même m’en rendre compte et je retombe dans les bras de mes fantômes, dans mes ténèbres, dans mes hontes, dans mes remords, dans mes joies aussi, dans mes bonheurs, mais oui ! Et alors, comment l’expliquer ? Je m’y sens chez moi. C’est mon monde, parfois cruel et sombre, parfois plein de lumière, celle qui ne se fait que sur les tombes, sans doute, mais c’est mon monde…
De tout ce que j’écris, je garde très peu. Périodiquement, je trie, j’éradique, je déchire, je supprime avec fébrilité. Je conserve aussi des textes que je ne montrerai jamais à personne. Ceux que je destine à mon après-vie. Que ma femme, mes filles pourront lire quand je ne serai plus qu’un souvenir de mari, de papa, pour qu’elles découvrent quelqu’un d’autre, quelqu’un qu’elles ne soupçonnaient peut-être pas. Qu’elles avaient pressenti, peut-être, vaguement, au détour d’un sourire où dans l’éclat d’un regard, et je veux croire que ce que leur donnerai à voir de ce quelqu’un d’autre les étonnera. Et qu’elles aimeront cette autre partie de moi autant que celle qu’elles connaissaient. Leur amour sera ainsi total, comme le mien pour elles.

« Je est un autre » disait Rimbaud. Je comprends parfaitement ce qu’il voulait dire. Je ne connais de moi que ce que j’ignore de mon alter ego. Et vice versa. Je me sais capable de verser dans le n’importe quoi de l’ivresse d’être ou de demeurer prostré dans une sorte de catalepsie proche de l’abrutissement, statufié, insensible à ce qui m’entoure, comateux, sourd et muet au chant des sirènes que je prends pour des murènes, ligoté au mât de ma désespérance chronique. Et je ne reprends vie que par la grâce de cette envie d’écrire qui finit toujours par reprendre possession de moi, cette envie d’écrire qui me tient debout, avec ce qui me reste de ma dignité d’homme. Je sais que je ne suis pas plus mauvais qu’un autre. Mais je sais aussi que je ne suis pas meilleur. Je n’aime pas cette humanité, mais j’en fais partie jusque dans ce qu’elle a de pire. C’est une malédiction dont je sais que je ne pourrais jamais me libérer. L’image que je donne a voir, ça n’est pas moi, et je sais qu’il en est de même de mes amis les plus proches. On ne se connait jamais vraiment. C’est sans doute mieux ainsi… Mais comment ne pas se poser la question : « Qui suis-je vraiment ? Celui que je sais mais que je tais ? Ou celui que je donne à voir, cet arbre acceptable qui cache la forêt de l’inavouable ? »  Je n’ai pas honte de mes hontes mais je les garde pour moi. Ou j’en parle, comme ici, sachant que je ne risque rien à le faire sauf de me faire rejeter peut-être ou moquer, ou haïr… Ce qui est peu de chose.
A ce point de mes digressions, je ne sais même plus le pourquoi de ce texte. Qu’est-ce-que j’ai voulu dire ? D’où sui-je parti et pour arriver où ? Je l’ignore. Je me suis abandonné à cette hémorragie verbale impudique sans savoir où elle me mènerait. Je n’y vais rien changer. Comme disait l’autre : Comprenne qui pourra, ou voudra. Moi, je ne peux pas. Je voudrais simplement ne pas passer pour un monstre, mais je ne suis pas certain de ne pas en être un…

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Message par Errances Sam 21 Jan - 17:03

Étrange cette conscience de soi tellement prégnante que tu, toi aussi, te sens monstre.

Errances

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Message par Errances Sam 21 Jan - 17:12

des cache-mire dans des cachettes
insoupçonnées troublées
d'un inavouable vécu

et si tout était pardonné
la vie refaite ayant tout lavé
si le prix avait déjà été payé
y'a-t-il besoin d'exumer
la folie de ce passé
soigneusement enterré

20230121


Dernière édition par Errances le Sam 21 Jan - 22:54, édité 1 fois

Errances

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Message par Benoit (admin.) Sam 21 Jan - 18:28

De manière générale, pour ceux qui ont une conscience accrue d'eux-mêmes, nous savons ce que nous aurions pu être, ce que nous sommes et ce que nous pourrions devenir et cette perception nous permet de faire les choix qui font que...ce que l'on pourrait qualifier d'égoïsme est quelquefois une manière (et chacun a la sienne) d'être fortement altruiste, ce n'est pas le regard des autres qui doit déterminer qui l'on est vraiment mais bien soi-même mais cela demande d'abord cette conscience et cette même perception, celles des êtres dits sensibles, hypersensibles, solitaires, renfermés (ces deux derniers qualificatifs ne sont que des apparences aux yeux des autres) mais pas la réalité de nos êtres complexes souvent inadaptés à la vie qui leur est proposée.

Alors tes considérations sont loin d'être stériles (ne serait-ce que pour toi) et je ne vois personnellement aucune impudeur dans ce que tu écris, j'y vois du courage, le fait d'assumer et bien entendu une recherche qui jamais ne sera satisfaite je pense car tel est le lot de certains qui ont cette soif de connaissance. Je pense et je parle d'expérience que la plupart des questions que nous nous posons sont inutiles puisque les réponses à celles-ci viennent d'elles-mêmes en temps voulu et elles deviennent évidences à partir de ce moment là, plus on en a conscience vite moins elles nous taraudent mais bien entendu ne serait-ce que pour le comprendre certaines questions se doivent d'être posées.

Concernant l'écriture j'ai le même sentiment, celui de ne jamais vraiment être maître de ce que j'écris étant donné que le processus est le même : un mot, une image, une émotion et là c'est le torrent, la cascade de mots qui dictent mes textes, ce qui a pour avantage d'être lecteur tout autant qu'auteur et quelque part c'est bénéfique pour l'écriture.

Mais ton écriture est authentique, tes images fortes et je prends beaucoup de plaisir à te lire et n'est-ce pas l'essentiel après tout, ce sentiment de n'être et n'avoir jamais été seul par ce biais, j'ai beaucoup appris de mes lectures, de mes lecteurs et de mes écrits car cette soif de connaissance nous l'avons en commun et je ne pense pas d'ailleurs que nous n'ayons que cela en commun.

Merci de partager et ce de belle manière tes pensées car elles sont loin d'être inutiles.

Amicalement.
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Message par Lydia Lun 23 Jan - 15:18

Je voudrais simplement dire que tu es toi, tellement humain. Et je me retrouve aussi dans beaucoup de tes aspects. J'ai du mal à concevoir qu'on puisse créer uniquement par l'imaginatif, il y a forcément dans les sujets quelque chose qui nous ressemble, nous émeut, nous ramène à nous. Ta sincérité est certainement ce qui fait l'attrait de tes écrits, car elle nous permet de nous y retrouver (où pas), mais de nous dire que nous appartenons à la même espèce. Amitiés 😘
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Message par ibere64 Mar 24 Jan - 13:33

Merci à vous trois. J'ai peur, parfois, de l'écho négatif que pourraient me renvoyer certains de mes textes. je ne crains pas la critique, mais j'ai déjà vécu la violence suscitée par certaines de mes publications. C'était ailleurs qu'ici. Je n'écris pas pour être aimé, mais pas non plus pour être détesté! Alors merci à vous encore une fois pour votre bienveillance.
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Considérations stériles sur l'impudeur d'écrire... Empty Re: Considérations stériles sur l'impudeur d'écrire...

Message par Zaza_Dabord Jeu 26 Jan - 14:16

La plume est comme le pinceau, il y a toujours de l'autoportrait dans ce que l'on imagine, ça me semble normal. Tout ne peut pas sortir de nulle part, il faut bien s'ancrer dans notre propre réalité avec nos observations et nos conclusions. L'important c'est d'exprimer ce que l'on a envie de délivrer. :-)

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